....Le bébé, l'eau et l'ivraie..The baby, the water and the chaff....
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J’ai été très surprise par le ton vindicatif de la journaliste Michèle Ouimet, le 1er novembre, dans sa chronique de la Presse+.
Le Québec a eu toutes les misères du monde à sortir la religion de l’école. On ne va tout de même pas la laisser entrer de nouveau par la porte de derrière sous prétexte que les commissions scolaires sont affamées.(1)
Sa montée aux barricades pointe vers les «groupes religieux» qui louent des locaux dans certaines écoles de la Commission scolaire de Montréal (CSDM), ou qui osent, comble d’horreur, offrir leur service de bénévolat dans ces mêmes écoles.
Les groupes religieux pourraient profiter de leur présence dans une école pour se donner un vernis de crédibilité. Les jeunes sont malléables et influençables, ne l’oublions pas.(1)
Deux exemples de ces «groupes religieux» sont donnés. M. Adil Charkaoui avait loué des locaux au Collège de Maisonneuve et au Collège de Rosemont, où il donnait des cours d’arabe et de religion islamique. Ce dernier a vu, en février dernier, ses contrats de location rompus lorsqu’une enquête a révélé que certains jeunes ayant assisté à ses cours étaient partis rejoindre l’EI.
L’autre exemple est l’église baptiste du Plateau Mont-Royal qui loue l’auditorium de l’école secondaire Jeanne-Mance les dimanches pour des activités religieuses, et qui a offert son aide à la directrice de l’école, par exemple pour l’aide aux devoirs.
Ces deux situations sont-elles vraiment à mettre dans le même panier?
Selon Mme Ouimet, il est très risqué de laisser les commissions scolaires juger de la différence, de discerner «le bon grain de l’ivraie». Cela requiert une expertise et une analyse idéologique pointue. Vraiment?
Le niveau de discernement, que l’on pourrait ici définir par «le gros bon sens», est-il rendu si bas dans la Belle Province que les dirigeants de nos commissions scolaires ne peuvent plus faire la différence entre, d’une part, une affiliation potentielle à un «groupe terroriste» qui admet le meurtre et le viol, et d’autre part, un «groupe religieux» dont les convictions portent ses membres à aider bénévolement la communauté locale sur un point ou l’autre?
En fait, le discernement a déjà été très bien fait par la CSDM. Les contrats avec M. Charkaoui ont été rompus même avant la fin de l’enquête, alors que l’église baptiste du Plateau Mont-Royal pouvait poursuivre sa location de locaux. Par ailleurs, l’aide offerte par cette dernière est actuellement analysée par la direction, dans une relation d’ouverture et de respect mutuel.
La chronique de Mme Ouimet va à contre-courant de cette relation d’ouverture en plus de dénier toute possibilité de discernement. La solution, selon Mme Ouimet, serait de «jeter le bébé avec l’eau du bain», c’est-à-dire d’aller au bout de la purge en fermant la porte à tous les «groupes religieux» qui voudraient mettre le pied dans une école de la CSDM.
Mais, au fait, Mme Ouimet, est-ce idéologiquement acceptable, ou même suffisant, que cette table rase «ciblée»? Qui en jugera? Vous, moi? Qui est-elle cette élite nationale à qui vous reconnaissez le pouvoir et le droit de modeler la bulle de cristal de notre système d’éducation où doivent paître paisiblement les esprits «malléables et influençables» de nos enfants, adolescents et jeunes adultes?
Et, tant qu’à y être, ne devrions-nous pas jeter avec le bébé et l’eau, tous les iphones, ipads, iséries, ordinateurs, télévisions qui les captivent le jour durant, toutes idéologies confondues, bien plus qu’une séance d’aide aux devoirs à l’école? Sans oublier les amis de mauvaises influences (peut-être certains prononceront-ils le nom de Jésus devant eux), et jusqu’à l’influence parentale dont il est difficile de juger, au final, si elle est idéologiquement acceptable.
Vous me direz que la sphère privée, ce n’est pas pareil, que vous parlez de notre système d’éducation public, ce joyau national qui s’effrite sous nos yeux.
Public ou privé, là n’est pas la question.
Parler d’éducation, c’est justement donner les outils nécessaires pour que se développe un discernement plus raffiné, plus analytique, à même de soutenir une recherche de vérité bienveillante et de supplanter les préjugés.
Enfin, j’aimerais rappeler que la capacité de penser, de discuter, d’analyser, de discerner a été enseignée, transmise avec passion, à toute une génération de leaders, ceux-là même qui ont forgé nos institutions actuelles, dont le système d’éducation. Il semble que, même si les professeurs dévoués d’alors exprimaient clairement leur attachement à l’Évangile, cela n’a pas empêché leurs élèves de prendre des orientations idéologiques diverses.
Je suis certaine cependant que l’éducation qu’ils ont reçue, tant au niveau de la capacité de réflexion que des valeurs humaines, a nourri leur parcours.
Un parcours vécu in vivo, dans le monde, là même où on aura jeter sans y prendre garde, pêle-mêle : l’eau, le bébé et l’ivraie.
Valérie Dionne
(1) Pour lire l'article de Michèle Ouimet, cliquez ici
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I was very surprised by the vindictive tone used by the journalist Michèle Ouimet in her November 1st, 2015 column in the Presse+.
Getting rid of religion from the school curriculum in Quebec was such a painstaking process, we are not going to let religion in through the back door under the pretence that school boards crave for money.(1)
Her outcry is aimed at «religious groups» which rent rooms in certain schools from the Montreal School Board (CSDM), or even worse, offer volunteer services to those same schools.
Religious groups could exploit their presence in a school as an opportunity to boost their credibility. Do not forget that youth are malleable and impressionable (1).
Two examples of these religious groups are presented. First, M. Adil Charkaoui who rented rooms at CEGEP Maisonneuve and at CEGEP de Rosemont, where he gave Arabic and Islamic courses. Last February, he saw his rental agreements broken when an investigation revealed that certain youth, who had attended his classes, had left the country to join ISIS.
The second example concerns the Baptist Church on the Plateau Mont-Royal, which rents the Jeanne-Mance High School auditorium on Sundays for religious activities, and who offered assistance to the Principal for students requiring help with their homework.
Is it proper to put both situations in the same basket?
According to Mrs. Ouimet, it is quite risky to let the school judge the difference, to discern «the wheat from the chaff». It apparently requires special skills and an astute ideological analysis. Really?
Has the level of discernment, that could be defined here as "common sense", become so scarce in the Province of Québec, that our school board officials can no longer differentiate between, on one hand, a potential affiliation to a terrorist group that does not sanction murder nor rape, and, on the other hand, a religious group whose convictions incite its members to help, on a volunteer basis, the local community meet its needs?
In fact, the Montreal School Board has already well made the discernment. Rental agreements with Mr Charkaoui were broken, even before the start of the investigation, whereas the agreements with the Baptist Church on Plateau Mont-Royal were maintained. Furthermore, the assistance offered by the Baptist Church is being investigated by the Principal's office, in a gesture of mutual respect and open-mindedness.
Mrs. Ouimet's column, while denying any possibility of discernment, goes against the establishment of a relationship based on open-mindedness. The solution, according to Mrs. Ouimet, is to «throw out the baby with the bath water», in other words proceed with a complete purge by closing the door to «religious groups» attempting to set foot in any school of the Montreal School Board.
By the way, Mrs. Ouimet, is it ideologically acceptable, or even sufficient, to do away with all «religious groups»? Who will be the judge? You, or I? Who is that national elite to whom you acknowledge the right and the power to shape the «green pasture» of our education system where the «malleable and impressionable» minds of our children, adolescents and young adults are supposed to graze?
And while you are at it, why not throw away «the baby with the bath water», along with all the iPhones, iPads, iSeries, computers, televisions, which captivate their attention throughout the day, all ideologies confounded, more so than a short session of help with school homework? And don't forget friends of bad influence (maybe one might utter the name of Jesus in front of them), or even parental influence, which is hard to judge, and for all we know, might be ideologically unacceptable.
You may argue that what's in the private domain is not at stake here, and that you want to deal with the public education system, this national treasure that is falling apart in plain view. Public or private, that's not the issue.
Addressing education is precisely about providing the necessary tools that will foster more refined, more analytical discernment, able to sustain a quest for benevolent truth, and to set prejudices aside.
Finally, I would like to remind everyone that the capacity to think, to discuss, to analyse, to discern, has been taught and passed on with passion to a whole generation of leaders, those who forged our current institutions, including our education system. Even though devoted teachers of yesteryear expressed clearly their belief in the Gospel, it did not prevent their students from embracing very diverse ideologies.
I am convinced, though, that the education they received, whether it stimulated their capacity to reflect or their human values, served them well in their endeavours. A life experience in vivo, in the world, that very same world which, inadvertently, threw away, jumbled together, the baby, the water and the chaff.
Valérie Dionne
(1) To read the article by Michele Ouimet, click here
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